lundi 17 octobre 2011

Transversal

Il fait froid.
Il fait noir.
Un bourdonnement me rassure.
Je ne suis pas seul.
Intrigué, surpris, j'me demande ce qu'elle fait là. Je bouge. Je ne la vois pas. Des griffes raclent le sol et au loin apparaît une colonne de lumière. Deux étincelles. Instinct de mort.
Instinct de survie dans l'esquive, sans mon armure ni mes armes, mais pas nu. Au sol des lames jumelles. Un entrainement ? Encore ce grincement. Je devrais avoir peur, mais je suis trop surpris pour ca. J'évite les assauts. Les lames sont belles. Pourquoi fait elle ca ? Trop de réflexion encore. C'est un jeu ou elle n'a aucune chance de me vaincre.
Les lames sont belles, presque trop fragiles pour être maniées. Elles sont plus noires qu'une nuit sans étoiles. Je les prend en mains et un long sifflement se fait entendre. Une vive douleur emplit l'air, je ne respire plus par les voies naturelles. Pas eu le temps de jouer avec les engins. Une plainte de tristesse au loin, la colonne de lumière se floute... Il fait sombre... Ailleurs.
Une silhouette un peu brillante, douce lueur avec des zones d'ombre se rapproche. Un corps de femme m'observe, toujours les lames aux mains. Sur mes gardes prêt à trancher car le danger est partout, mais sa main me frole le menton et brule mes cotes. Les cloches de la douleur sonnent de leur plus bel éclat mais je résiste. Je résiste jusqu'à ce simple regard. Je tombe à nouveau.
Ici.
Ma tête n'est qu'une caisse de résonnance et elle me recommande fortement de rester au sol. J'aime pas l'écouter. J'observe et les lames semblent fondre. Curieux liquide mu par la volonté de me rejoindre... Au dessus de moi le souffle rassuré d'un être au pouvoirs mortels qui ne me lache pas des yeux. Elle attend...
Un liquide rouge s'étend autour de moi et se mélange au noir des dagues avant de revenir en moi vite, trop vite. Des milliers d'images, certaines inutiles d'autres non. Un savoir oublié revient dans le mélange qui coule dans mes veines. Ca brule, ca veut sortir. La douleur convulsionne mon corps. Je respire du mercure et le fer chauffé à blanc marque ma peau de sa brulante caresse. Étourdi, je pars encore dans les limbes mais pas assez longtemps pour en profiter. Amorphe, je me vois dans le reflet d'un miroir invisible. Les marques se mettent en place, serpents symétriques enserrant mon corps avec leurs anneaux. Je reconnais cette encre et je comprends ce qu'il se passe. Malgré la douleur je souris.
"Il paraît que l'on ressent mieux les choses sans armure."
Un murmure dans une salle sans vent. Une paire d'yeux dans mon dos, lueurs amusées qui pensent pouvoir jouer avec moi.
C'est fini et ca fume encore. Ca raconte une histoire dans un langage non verbale, je me perds dans les courbes sinueuses sur mon bras. Symétrie apparente, subtiles différences de part et d'autres. Seule une n'a pas bougé, cicatrice éternelle, secret de moi. Plus d'épées, plus de masque, plus d'acier mais quelque chose de plus solide. Visage finement dessiné aux traits et courbes subtiles menant à ma vérité pour qui ne perdra son esprit en en cherchant le chemin. Malgré tout la nuit m'entoure seul souvenir tangible du passé tunique manteau nocturne me dissimulant à la vue de tous...
Comment me battre ? Je regarde mes mains plus sombres que la nuit et je comprends. Griffes nocturnes capables de trancher les ténèbres, le pouvoir de sectionner la réalité au bout des ongles. Et toujours ces huit points joyaux d'encre marquant la symétrie... Je la trouve belle. L'entrainement reprend sans prévenir, gerbe d'étincelles sur mon bras, pas de cicatrice et pas de sang, l'encre rougit, seulement l'impact. Les choses sont toujours sérieuses. Une impulsion. Toutes griffes dehors, je tombe nez à nez avec mon agresseur, prêt et elle l'a compris. Front contre front et caresse rapeuse d'une langue sur ma joue. Tout ira bien, nous jouons à armes égales maintenant. Sous ma main la fourrure s'abaisse doucement vivante. Des couleurs sur ma peau. Le repos d'une arme.

Le réveil.

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